Etude du rôle de la glucosylcéramide dans le mélanome cutané
Patricia Dubot
Equipe Melasphinx Métabolisme du céramide dans le mélanome : des mécanismes moléculaires à l’immunothérapie
Le mélanome cutané (MC) est le cancer le plus sévère des cancers de la peau dont l’incidence ne cesse d’augmenter. Malgré des avancées majeures dans la prise en charge du MC avec le développement des thérapies ciblées et de l’immunothérapie, le pronostic des patients atteint de MC reste mauvais. Dans le mélanome cutané, des altérations du métabolisme des sphingolipides, une classe de lipide particulier, ont été montrées par notre équipe et d’autres. Ces altérations pourraient avoir un rôle dans la survenue, la progression et la résistance aux thérapies et s’articulent essentiellement autour d’une diminution de la production du céramide, considéré comme un anti-oncométabolite, et en faveur d’une augmentation de sphingosine-1-phosphate, considéré comme un oncométabolite. La glucosylcéramidase, codée par le gène GBA, est une enzyme lysosomale qui catalyse la dernière étape du catabolisme des sphingolipides transformant le glucosylcéramide (GlcCer) en céramide. L’analyse d’un exome de patients atteints de MC a révélé des mutations faux-sens dans le gène GBA. Le déficit en GCase est connu pour être responsable de la maladie de Gaucher, une maladie de surcharge lysosomale dans laquelle les patients présentent une organomégalie avec ou sans troubles neurologiques. L’origine de ces symptômes serait l’accumulation du GlcCer qui n’est plus dégradé, ainsi que sa forme déacylée, la glucosylsphingosine (GlcSph). De plus, ces patients ont un risque accru de développer des cancers et notamment le mélanome cutané. Le rôle de ces métabolites dans le développement des cancers est évoqué. Parallèlement, les mutations de GBA, à l’état homozygotes mais aussi hétérozygotes, sont un facteur de risque de développer la maladie de Parkinson, une maladie neurodégénérative dans laquelle des agrégats d’alpha-synucléine sont retrouvés dans les
neurones. Le déficit en GCase, via l’accumulation en GlcCer et GlcSph, favoriserait l’agrégation d’alphasynucléine. De façon intéressante, les patients atteints de la maladie de Parkinson présente un risque augmenté de développer un mélanome cutané. Les agrégats d’alpha-synucléine, secondaire au déficit en GCase, pourrait jouer un rôle dans la mélanomagenèse.
Les mécanismes qui sous-tendent le lien entre la maladie de Gaucher et le mélanome cutané reste inconnus. Notre projet est de déterminer le rôle de la GCase dans le développement du mélanome cutané. Pour cela, des lignées cellulaires de mélanome humain (A375) ont été utilisées, dans lesquelles l’expression et/ou l’activité de la GCase ont été inhibées par ARN interférence (sh dirigé contre GBA) ou par inhibition pharmacologique (Conduritol B Epoxide) et dans lesquelles la surexpression de la GCase sauvage et mutée a été réalisée par transduction lentivectorale. Ces lignées ont également été traitées par la GlcSph pour l’étude de son implication dans la tumorigenèse. Les propriétés tumorales ont été étudiées comme la prolifération, le cycle cellulaire et la réponse aux thérapies ciblées, ainsi qu’une analyse des sphingolipides. L’expression de l’alpha-synucléine a également été analysée dans ces différents modèles cellulaires.
Nous avons montré que l’inhibition de l’expression/activité de la GCase n’a pas modifié les propriétés tumorales comme la prolifération cellulaire et la sensibilité aux thérapies ciblées. Cependant, le traitement des cellules de mélanome avec la GlcSph montre une diminution transitoire et réversible
de la prolifération et la production de cellules multinucléées dont la fonction reste inconnue. Quant à l’expression de l’alpha-synucléine, nos premiers résultats ne sont pas concluant en raison de difficultés techniques.
Nos résultats bien que préliminaires montrent un effet de la GlcSph sur la prolifération ainsi que sur le cycle cellulaire, qui pourraient jouer un rôle dans la progression tumorale et nous donne des indications quant au métabolisme de la GlcSph.
Pour en savoir plus
Thèse soutenue le 14 décembre 2021
Retrouver le texte intégral de la thèse sur le site de l’université Paul Sabatier